Interview de Sandrine Crosnier, Technical Official sur les JO de Tokyo
Hormis nos cinq athlètes, une autre actrice du triathlon français a eu la chance de participer aux Jeux Olympiques de Tokyo. Il s’agit de Sandrine Crosnier, arbitre française expérimentée, qui officiera en tant que technical official au Japon. Elle nous en dit plus dans l’interview qui suit.
Sandrine, Peux-tu te présenter succinctement ?
Sandrine Crosnier : J’ai 43 ans, je suis mariée avec 4 enfants (2 filles et 2 garçons âgés de 12 à 19 ans) et je travaille avec mon mari dans notre cabinet d’expertise-comptable. Après avoir habité dans le Cher, nous résidons désormais à Fondettes, à quelques kilomètres de Tours.
Comment es-tu venue au triathlon ?
Mes enfants ont pratiqué le triathlon et moi-même un peu en loisir. J’ai d’abord été licenciée au Tri Sud 18. Le club ayant besoin d’arbitres, j’ai accepté de donner un coup de main en 2012. Comme l’expérience a été positive, j’ai décidé de renouveler l’expérience.
Quand es-tu devenue arbitre internationale ?
En 2015, une manche de coupe d’Europe a été organisée à Châteauroux. L’ITU a demandé à des arbitres de la région Centre d’intervenir sur l’épreuve. Pour cela, nous avons suivi une formation Level 1 à Besançon lors de la Coupe du Monde de Paratriathlon. Je suis donc devenue arbitre internationale avant d’être arbitre nationale. J’ai rectifié le tir en 2017 en intégrant le cursus national en tant que national 3. Après une formation de 4 jours en Espagne, j’ai obtenu en 2018 le level 2 à l’international.
Depuis, tous les ans, j’officie sur de nombreuses courses internationales, cela va de la coupe du monde de paratriathlon aux Jeux méditerranéens en passant par des coupes d’Europe et une WTCS.
Comment as-tu été retenue pour les Jeux Olympiques de Tokyo ?
En fait, je n’ai pas pensé à la sélection pour Tokyo, j’espérais un jour pouvoir participer à des Jeux mais je pensais plutôt à ceux de Paris ou l’on a plus de chance de participer (il y a plus d’officiels du pays organisateur). Il faut préciser que l’on ne postule pas pour aller aux Jeux, il faut être Level 2.
World triathlon établit une liste officielle de de Technical Officials potentiels. Cette liste comprend tous les officiels Level 2 et 3 de World triathlon. Chaque fédération doit puiser dans cette liste pour choisir les officiels qu’elle va proposer, à la fois pour les Jeux Olympiques et les Jeux Paralympiques. Il fallait donc être disponible pour ces deux évènements. La F.F.TRI. a proposé deux femmes et deux hommes. Au bout du compte, c’est Pascal Godel (pour les JP) et moi-même (pour les JO) qui avons été retenus. Je n’en reviens encore pas. Mes vacations antérieures ont dû convaincre et j’ai sans doute rencontré les bonnes personnes. Je dois reconnaître aussi que j’ai bénéficié de la parité qui a été imposée pour ces Jeux de Tokyo.
Comment ta famille a-t-elle accueilli la nouvelle ?
Tout le monde est fier de moi. Ils sont habitués à me voir partir les week-ends pour aller arbitrer (15 week-ends environ par an). Avec 4 enfants, cela nécessite une organisation drastique. Pendant que je serai à Tokyo, les deux derniers seront en colonie ce qui soulagera le reste de la famille.
À quelle date est prévue ton départ vers le Japon ? Quelles seront les contraintes liées à la Covid-19 ?
Mon avion s’envolera le mercredi 21 juillet à 23 heures. À l’aéroport, je devrai présenter mon passe sanitaire avec deux tests PCR négatifs. À mon arrivée au Japon, je devrai subir un nouveau test PCR. Je serai ensuite pris en charge par un bus de l’organisation qui me conduira à mon hôtel, le Shinagawa Prince Hôtel, de très bon standing où une bulle sanitaire aura été constituée.
Comme tout le monde, je serai dans une chambre individuelle. Sauf dans des cas bien réglementés comme lors des rendez-vous de travail avec l’organisation, je ne pourrai pas sortir de l’hôtel. Nous aurons néanmoins la possibilité de nager et de courir 1 heure par jour. Sinon, hormis les jours de course, les repas seront servis en chambre. Il faut donc se préparer psychologiquement à cette situation. Pour ma part, je suis prête, tellement heureuse de participer. Si j’ai du temps libre, j’en profiterai pour travailler à distance, et vous envoyer des nouvelles !
Quel sera ton rôle sur ces Jeux Olympiques ? As-tu suivi une formation au préalable ?
J’officierai sur l’Aid station sur la course à pied. Nous sommes formés pendant nos différentes épreuves. J’ai assisté à plusieurs réunions de préparation.
Sous les ordres du responsable, je m’occuperai d’abord de la mise en place des bénévoles. Ensuite, je devrai vérifier la conformité des tables sur lesquelles seront placées les bouteilles d’eau. Je devrai également m’assurer que celles-ci seront bien fermées. Pendant la course, je vérifierai le bon respect des règles de course. Si je constate une infraction, je devrai le signaler à mon responsable qui préviendra l’head referee (arbitre principal).
Appréhendes-tu le jour J ?
Absolument pas. Aux JO, tout est calé avant les épreuves, rien n’est laissé au hasard. J’appréhende plutôt le fait de ne pas pouvoir participer aux JO en raison d’une maladie ou d’un test PCR positif. Je serai heureuse quand le départ des courses sera donné. J’aurai la chance d’occuper un poste qui me permettra d’être aux premières loges des compétitions. J’espère que je verrai les Français aux avant-postes (même si en tant qu’officielle je n’ai pas de couleurs, ils restent dans mon cœur). Je n’aurai bien sûr pas le droit de les encourager. Même si les JO ne seront pas aussi festifs qu’à l’accoutumée en raison de la crise sanitaire, l’expérience s’annonce fabuleuse. J’ai encore du mal à réaliser la chance que j’ai.
Et comment vois-tu l’après JO ?
Participer 1 fois à des Jeux c’est déjà le top ! Mais il est vrai qu’avec les Jeux sur notre territoire, j’ai peut-être une chance… La France prépare déjà les officiels pour Paris. On sera plusieurs en liste… Fingers crossed.